Expatriation : Déterminer le régime matrimonial

Le mariage soumet-il nécessairement les époux à un régime matrimonial ?
Se marier, c’est s’engager l’un envers l’autre, mais c’est aussi se soumettre à un régime matrimonial.
Avec ou sans contrat, les époux sont nécessairement soumis à un régime matrimonial. Le mariage a en effet des conséquences d’ordre pécuniaire pour les époux, non seulement dans leurs rapports réciproques, mais aussi dans leurs rapports avec les tiers , spécialement avec leurs créanciers.
Qu’il s’agisse d’un « mariage mixte » (entre une personne française et une autre de nationalité étrangère) ou de l’union de deux nationaux qui décident de fixer leur résidence à l’étranger, les époux peuvent choisir librement leur régime matrimonial en établissant un contrat de mariage devant notaire. À défaut de contrat, ils devront s’informer auprès d’un notaire sur la loi applicable et sur la nature de leur régime matrimonial.

Le conseil du notaire : Dans un contexte international, seul un contrat de mariage peut assurer aux époux la sécurité et la stabilité juridique. Si le contrat n’a pas été établi avant le mariage, le notaire trouvera le plus souvent un moyen d’y remédier en utilisant, par exemple, l’article 6 de la Convention de La Haye sur le changement de loi applicable

Quels sont les critères retenus par la Convention de La Haye pour les couples mariés après son entrée en vigueur ?
La Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur les régimes matrimoniaux, entrée en vigueur le 1er septembre 1992 en France, au Luxembourg et aux Pays-Bas, est un instrument efficace pour régler un grand nombre de questions, en particulier celle de la détermination du régime matrimonial. C’est une Convention universelle qui a vocation à s’appliquer tant pour les Etats qui l’ont ratifiée que pour les Etats tiers. Par exemple, la Convention s’appliquera à la détermination du régime matrimonial des époux algériens ou allemands en France alors que ces deux Etats ne l’ont pas signée.
Pour déterminer la loi applicable à défaut de contrat de mariage pour les époux mariés à partir du 1er septembre 1992, c’est l’article 4 de la Convention de La Haye qui a résolu cette question.
Selon l’article 4 alinéa 1, si les époux n’ont pas avant le mariage, désigné la loi applicable à leur régime matrimonial, celui-ci est soumis à la loi interne de l’État sur le territoire duquel ils établissent leur première résidence habituelle après le mariage.
En l’absence de résidence commune, l’article 4 alinéa 2, prévoit d’appliquer la loi nationale commune des époux.
Exemple: Si un Franco-Marocain épouse à Casablanca une de ses compatriotes et laisse sa femme au Maroc pour venir travailler en France, il sera soumis au régime légal marocain de la séparation de biens. Enfin, l’article 4 alinéa 3 dispose que lorsque des époux n’ont pas de résidence habituelle dans le même État après leur mariage ou n’ont pas de nationalité commune, « leur régime matrimonial est soumis à la loi interne de l’État avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, ils présentent les liens les plus étroits ».
Exemple: Un Français épouse une Autrichienne à Vienne. Pour des raisons professionnelles, Monsieur vit à Paris alors que Madame a son domicile à Genève. La détermination de leur régime matrimonial s’avère délicate. Il conviendra de rechercher le pays avec lequel ils ont les liens les plus étroits, ce qui pourra susciter des désaccords au sein du couple.

Comment déterminer le régime matrimonial des couples mariés avant le 1er septembre 1992 ?
À défaut d’application de la Convention de La Haye du 14 mars 1978 (qui s’applique aux époux qui se sont mariés ou désigne la loi applicable à leur régime matrimonial après 1er septembre 1992), il y a lieu d’appliquer les règles françaises de conflit de lois pour la détermination du régime matrimonial, Ces règles retiennent le principe de l’autonomie de la volonté dans la détermination de la loi applicable au régime matrimonial, c’est-à-dire la loi que les époux ont implicitement choisie.
Le droit international privé français et la jurisprudence considèrent que cette volonté se traduit par le choix du premier domicile matrimonial des époux. Ce domicile est « le lieu où les époux entendent fixer et fixent effectivement leur établissement d’une manière stable ». Une durée de deux ans permet réellement de déterminer le domicile matrimonial.
Exemple: En 1988, Monsieur, de nationalité française, et Madame, de nationalité argentine, se sont mariés sans contrat en Argentine où ils ont vécu plusieurs années. Ils sont donc placés sous le régime légal argentin de la société conjugale.

Pour prévenir toute mauvaise surprise et lever toute incertitude quant à la détermination de leur régime matrimonial, les époux qui n’ont pas fait de contrat de mariage et qui se sont mariés avant 1992 peuvent recourir à l’action en déclaration de loi applicable (par requête conjointe adressée au juge) ou encore soumettre par acte notarié leur régime matrimonial à une loi interne autre que celle jusqu’alors applicable (article 21 et 6 de la convention de La Haye), sachant que cette seconde solution s’avère beaucoup plus simple

A défaut de contrat de mariage, la détermination du régime matrimonial est-elle définitive ?
Si les époux ont fait un contrat de mariage, la permanence prévaut quant à la loi applicable et le régime matrimonial choisi (Voir fiche sur l’intérêt de faire un contrat de mariage dans un contexte international). Seule une volonté contraire des deux époux pourra provoquer un rattachement à une nouvelle loi.
Exemple: Si deux époux, elle Française, lui Autrichien, souhaitent établir un contrat de mariage par devant un notaire autrichien et se soumettre au régime autrichien de la séparation de biens, ils resteront soumis à ce régime même si par la suite ils viennent s’installer en France. Le contrat de mariage fixe le régime matrimonial dans le temps et dans l’espace.

En revanche, à défaut de contrat de mariage et lorsque la détermination du régime matrimonial s’est faite selon les critères retenus à l’article 4 de la Convention de La Haye, les époux risquent d’être confrontés à la mutabilité automatique de leur régime conformément à l’article 7 de la Convention, notamment lorsqu’une modification de résidence aura lieu (voir fiche: Comment éviter le changement automatique de régime matrimonial). Il convient néanmoins de préciser que cette mutabilité de la loi applicable ne concerne que les époux mariés depuis le 1er septembre 1992.

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